L’assureur est tenu de présenter une offre à la victime même s’il conteste son droit à indemnisation (Cass. Civ. 2ème, 26 novembre 2020, n° 19-18.817)

Accident de la route - délai offre d'indemnisation par l'assureur

Par un arrêt en date du 20 novembre 2020 (lien ici), la 2ème Chambre civile de la Cour de cassation rappelle que la contestation, par l’assureur du conducteur du véhicule impliqué dans un accident de la route, du droit à indemnisation de la victime ou de ses ayants droit, ne le dispense pas de présenter une offre d’indemnité dans le délai imparti par la loi.

La loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 dite « loi BADINTER » (du nom de Robert Badinter alors Ministre de la Justice et ayant inspiré la rédaction de cette loi) a créé un régime spécial d’indemnisation des victimes d’accident de circulation.

Le but de cette loi était d’améliorer la situation des victimes d’accidents de la route et d’accélérer les procédures d’indemnisation.

Parmi les obligations imposées aux compagnies d’assurance, certaines concernent le respect de délais en matière d’offre indemnitaire sous peine de sanctions.

Ainsi, l’article L 211-9 du code des assurances (lien ici) dispose que l’assureur est tenu de présenter :

  • Une offre dans les 8 mois de l’accident : définitive ou provisoire si l’état de santé de la victime n’est pas consolidé dans les 3 mois de l’accident ;
  • Une offre définitive dans les 5 mois de la connaissance de la date de consolidation (par l’assureur) de l’état de santé de la victime.

L’article L 211-13 du même Code (lien ici) prévoit, à titre de sanction, que « Lorsque l’offre n’a pas été faite dans les délais impartis à l’article L. 211-9, le montant de l’indemnité offerte par l’assureur ou allouée par le juge à la victime produit intérêt de plein droit au double du taux de l’intérêt légal à compter de l’expiration du délai et jusqu’au jour de l’offre ou du jugement devenu définitif (…) ».

Le Code des assurances prévoit toutefois que cette pénalité peut être réduite par le juge en raison de circonstances non imputables à l’assureur.

Mais qu’en est-il lorsque l’assureur conteste le droit à indemnisation de la victime et, par voie de conséquence, le principe même de son obligation ?

Telle était l’une des questions posées à la Cour de cassation dans la décision qui nous occupe.

En l’espèce, le conducteur d’une motocyclette a été victime d’un accident mortel de la route.

Sa veuve, agissant tant en son nom personnel qu’en qualité de représentante légale de ses deux filles mineures, a sollicité l’indemnisation des préjudices subis du fait du décès de son époux et notamment l’indemnisation du préjudice économique et du préjudice d’affection.

L’assureur du véhicule impliqué dans l’accident de la circulationhttps://www.bourdet-avocat.fr/lexique-juridique/accident-circulation-victime-avocat-indemnisation/, qui avait « coupé » la route au motard, estimant que ce dernier roulait à une vitesse excessive et avait, en conséquence, commis une faute de nature à réduire ou exclure l’indemnisation de ses préjudices, n’avait, en conséquence, pas adressé, aux ayants-droits de la victime, une offre indemnitaire respectant les obligations imposées par l’article L 211-9 précité.

La veuve de la victime a donc sollicité l’application de la pénalité prévue par l’article L 211-13 précité.

La Cour d’appel de VERSAILLES, aux termes d’un arrêt en date du 04 avril 2019, avait donné raison à l’assureur en estimant qu’il existait « une contestation sérieuse sur le principe du droit à indemnisation, ce qui justifiait de ne pas appliquer cette sanction ».

La Haute juridiction, par son arrêt du 26 novembre 2020, est venue censurer la position de la Cour d’appel de VERSAILLES en estimant que « (…) l’assureur était tenu de formuler une offre d’indemnité, même en présence d’une contestation sur le principe du droit à indemnisation de la victime ou de ses ayants droit (…) ».

Il convient de saluer l’arrêt rendu par la Cour de cassation qui maintient une position ancienne, favorable aux victimes de la route.

En effet, la Cour de cassation avait déjà estimé, par un arrêt en date du 11 septembre 2008 (lien ici) ; que « la contestation par l’assureur du lien de causalité entre le préjudice de la victime et l’accident en cause ne le dispense pas de faire, dans le délai requis, l’offre imposée par l’article L 211-9 du Code des assurances » (Cass. Civ. 2ème, 11 septembre 2008, n° 07-16340).

Une décision en sens contraire aurait pu inciter les compagnies d’assurance à contester de manière automatique et systématique le droit à indemnisation des victimes d’accident de la circulation pour être dispensés de leur adresser une offre d’indemnisation.

N’hésitez pas à contacter Maître Bourdet afin de lui exposer la situation dans laquelle vous vous trouvez ou la difficulté à laquelle vous êtes confronté.