Dans un arrêt du 6 février 2020 (lien ici), la Cour de cassation souligne que la victime d’un événement traumatique a droit au remboursement total du montant des honoraires des professionnels de santé dont les interventions ont contribué à l’évaluation de ses préjudices.
Il s’agit d’une application du principe de réparation intégrale des préjudices sans perte ni profit pour la victime.
Selon la Nomenclature Dintilhac, parmi les postes de préjudices dont la victime est fondée à demander réparation suite à l’événement traumatique qu’elle a subi, figurent les frais divers, à savoir l’indemnisation de « tous les frais susceptibles d’être exposés par la victime directe avant la date de consolidation de ses blessures et qui sont imputables à l’accident à l’origine du dommage corporel qu’elle a subi et notamment : les honoraires des médecins (spécialistes ou non) ayant assisté aux expertises » (voir à cet égard : Cass. Civ. 1ère, 22 mai 2019, n° 18-14063 ce dernier arrêt soulignant également que les juges du fond ne doivent pas dénaturer les documents de la cause et notamment les factures versées au débat selon un principe rappelé dans d’autres arrêts : Cass. Civ. 2ème, 10 mai 2012, n° 11-19270, Cass. Civ. 2ème, 29 mars 2012, n° 11-14661 ; Cass. Civ. 2ème, 15 septembre 2011, n° 10-19694, y compris dans le cadre d’expertises amiables précise la Cour de cassation : Cass. Civ. 2ème, 22 mai 2014, n° 13-18591).
Il est à noter qu’en la matière, le Conseil d’état adopte la même jurisprudence s’agissant du remboursement intégral des frais justifiés de médecins-conseils, y compris en cas de responsabilité et d’indemnisation partielles de la victime (CE, 5ème ch., 15 juin 2018, n° 409961).
Dans le cas d’espèce, les représentants légaux de la jeune victime d’un accident de la circulation ont estimé qu’elle devait être examinée par un neuropsychologue et un psychiatre pour que puissent être exactement appréhendés et estimés l’ensemble des dommages liés à l’accident, une expertise médicale judiciaire ayant par ailleurs été ordonnée par le juge des référés.
Au cours de la procédure en liquidation des préjudices, la Cour d’appel d’Amiens a jugé qu’il n’y avait pas lieu de faire droit aux demandes de remboursement des frais d’examens neuropsychologique et psychiatrique effectués à l’initiative des représentants légaux de la victime, considérant qu’il s’agissait d’investigations purement privées, qui ne sauraient donc être assimilées à des honoraires de médecins-conseils intervenant dans le cadre de l’expertise judiciaire, ayant seuls vocation à être inclus dans le poste « frais divers » de la Nomenclature Dinthilac.
Contestant cette position, la victime s’est pourvue en cassation.
Aux termes de la décision rendue le 06 février 2020 la Cour de cassation casse l’arrêt de la Cour d’appel en retenant que les juges auraient du rechercher si les examens contestés n’avaient pas été indispensables à l’évaluation des préjudices de la victime et n’étaient pas en conséquence imputables à l’accident de la route.
Par cette jurisprudence, la Haute juridiction garantit à la victime de pouvoir disposer des moyens nécessaires à l’exacte et équitable évaluation de ses dommages, dès lors que leur utilité n’est pas contestable.
Comme nous le soulignions dans une précédente actualité à propos de l’arrêt rendu par la Cour de cassation le 22 mai 2019, n° 18-14063 (lien ici), cette jurisprudence pourrait se réclamer également du droit à un procès équitable garanti par la Convention Européenne des Droits de l’Homme et de Sauvegarde des Libertés fondamentales, en son article 6, en permettant à la victime de s’assurer des moyens techniques et financiers de parvenir à la juste indemnisation de ses préjudices, notamment dans le cadre d’expertises médicales amiables et judiciaires.
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