Par un arrêt en date du 22 mai 2019 (lien ici), la Cour de cassation rappelle que la victime d’un événement traumatique a droit au remboursement intégral du montant des honoraires des médecins-conseils l’ayant assistée lors des expertises figurant sur les factures versées aux débats.
Il s’agit là d’une stricte application du principe de réparation intégrale des préjudices, sans perte ni profit pour la victime, mais également de l’obligation imposée aux juges du fond, par la Cour de cassation, de ne pas dénaturer les documents de la cause (voir notamment à cet égard : Cass. Civ. 2ème, 10 mai 2012, n° 11-19270 ; Cass. Civ. 2ème, 29 mars 2012, n° 11-14661 et Cass. Civ. 2ème, 15 septembre 2011, n° 10-19694).
Selon la Nomenclature DINTILHAC, parmi les postes de préjudices dont la victime est fondée à demander réparation suite à l’évènement traumatique qu’elle a subi, figurent les frais divers, à savoir l’indemnisation de « tous les frais susceptibles d’être exposés par la victime directe avant la date de consolidation de ses blessures et qui sont imputables à l’accident à l’origine du dommage corporel qu’elle a subi et notamment : les honoraires des médecins (spécialistes ou non) ayant assisté aux expertises », y compris dans le cadre d’expertises amiables, précise la Cour de cassation (Cass. Civ. 2ème, 22 mai 2014, n° 13-18591).
Par ailleurs, selon une jurisprudence séculaire (depuis un arrêt Veuve Foucauld et Coulombe c. Pringault, Civ., 15 avril 1872, « Les Grands Arrêts de la jurisprudence civile », tome 2, Dalloz, 12e éd., 2008, n° 161, p. 156), la Cour de cassation pose pour principe que si les juges du fond ont un pouvoir souverain d’appréciation des pièces de la procédure (contrats, actes unilatéraux, lettres missives, témoignages, factures, conclusions, etc.), ils ne doivent pas méconnaître les termes clairs et précis desdites pièces, à peine de dénaturation, c’est-à-dire commettre une erreur flagrante dans l’appréhension de la situation concrète qui leur est soumise.
Dans le cas d’espèce, après avoir reçu des soins orthodontiques, une personne a présenté différents troubles qui ont notamment entraîné une diminution de ses capacités professionnelles.
Victime d’une erreur médicale, elle a assigné en responsabilité et indemnisation le praticien, qui a été déclaré responsable des dommages qu’elle avait subis consécutivement aux soins dispensés.
L’une des questions posée à la Cour de cassation dans de la procédure qui lui était soumise, était de savoir si les frais d’assistance aux opérations d’expertise exposés par la victime, qui s’élevaient, selon les factures produites aux débats à la somme totale de 4.000,48 €, pouvaient être réduits à 3.750,48 €, comme l’avaient souverainement apprécié les juges de la Cour d’appel de LYON.
Aux termes de la décision rendue le 22 mai 2019, la Cour de cassation estime que dans la mesure où les factures relatives aux honoraires versés au médecin-conseil ayant assisté la victime lors de l’expertise médicale s’élevaient à la somme totale de 4.000,48 €, c’est bien de cette somme que devait être indemnisée la victime à ce titre.
La Cour de cassation a donc cassé l’arrêt de la Cour d’appel de LYON pour dénaturation des écrits qui étaient versés au débat.
La Haute juridiction confirme ainsi que la personne victime d’une erreur médicale, et plus globalement la victime de tout événement traumatique (accident de la circulation, agression, accident de sport, accident de la vie, etc.), a droit à un remboursement intégral du montant des honoraires qu’elle a exposés pour se faire assister par un ou des médecin(s)-conseil(s) l’ayant assistée lors des expertises médicales destinées à recenser et à quantifier ses préjudices.
Il est à noter que le Conseil d’état adopte la même jurisprudence de remboursement intégral des frais justifiés de médecins-conseils, y compris en cas de responsabilité et d’indemnisation partielles de la victime (CE, 5ème Ch. 15 juin 2018, n° 409961).
Ces positions jurisprudentielles pourraient également se réclamer du droit à un procès équitable garanti par la Convention Européenne des Droits de l’Homme et de Sauvegarde des Libertés fondamentales, en son article 6, en permettant à la victime de s’assurer des moyens techniques et financiers de parvenir à la juste indemnisation de ses préjudices, notamment dans le cadre des expertises amiables et judiciaires.
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