Par un arrêt du 31 mars 2020 (lien ici), la Cour de cassation souligne que la victime d’un accident de la circulation, constituée partie civile et dont le droit à indemnisation a été reconnu en vertu de l’article 470-1 du Code de procédure pénale, est fondée, malgré la relaxe du prévenu, à réclamer l’indemnisation des frais de procédure qu’elle a personnellement exposés au cours du procès et relevant de l’article 475-1 du Code de procédure pénale.
Rappelons que l’article 470-1 du Code de procédure pénale prévoit que lorsqu’une relaxe est prononcée par une juridiction pénale pour une infraction non intentionnelle, celle-ci demeure compétente pour statuer sur les demandes de la partie civile, en application des règles du droit civil, en réparation de tous les dommages résultant des faits objets de la poursuite.
L’article 475-1 du Code de procédure pénale dispose, quant à lui, que le Tribunal condamne la personne condamnée civilement en application de l’article 470-1 à payer à la partie civile la somme qu’il détermine au titre des frais non payés par l’Etat et exposés par cette dernière, en tenant compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée.
Dans notre affaire, à l’issue d’une procédure d’instruction, une personne dont le véhicule était impliqué dans un accident mortel de la circulation a été poursuivie devant le Tribunal correctionnel pour homicide involontaire par conducteur d’un véhicule sous l’empire d’un état alcoolique.
Les ayant-droits de la victime se sont constitués partie civile.
Le Tribunal a décidé de relaxer le conducteur du chef de l’infraction poursuivie mais, conformément à l’article 470-1 du Code de procédure pénale, a fait application des règles de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985, dite Loi Badinter, pour statuer sur les demandes en indemnisation formulées par les parties civiles.
Parmi les demandes des parties civiles, figurait le remboursement d’un préjudice matériel consistant en des frais d’expert privé et de détective privé engagés au moment de la phase d’instruction de l’affaire.
Le Tribunal correctionnel, comme la Cour d’appel de BASSE TERRE par la suite, a rejeté ces demandes en raison de la relaxe intervenue.
Les parties civiles se sont alors pourvues en cassation.
Elles ont rappelé que les juges n’étant pas liés par la décision de relaxe au pénal, ils auraient du rechercher, en fonction de la loi civile, si les frais de procédure supportés personnellement par les plaignants pour déterminer les circonstances exactes de l’accident de la route, relevaient des faits objet de la poursuite et devaient donc être à ce titre remboursés.
En d’autres termes, la question posée à la Cour de cassation était de savoir si une décision de relaxe entraînait d’elle-même le rejet des demandes formulées par une partie civile au titre des frais irrépétibles définis par l’article 475-1 du Code de procédure pénale.
Aux termes de sa décision rendue le 31 mars 2020, la Cour de cassation a cassé l’arrêt de la Cour d’appel BASSE TERRE.
La Haute juridiction relève que la Cour d’appel ne pouvait refuser d’indemniser la partie civile au titre des frais d’expertise privée et de détective privé en se fondant sur la décision de relaxe, alors qu’il lui appartenait de rechercher si ces frais entraient dans les prévisions de l’article 475-1 du Code de procédure pénale.
On ne peut que se féliciter d’une telle jurisprudence.
Il est en effet on ne peut plus logique et légitime que les frais irrépétibles ayant contribué à l’établissement des circonstances d’un événement traumatique (accident de la route, erreur médicale, agression, accident de la vie, accident de sport, etc…) et de ses conséquences fassent partie intégrante des préjudices indemnisables.
Par ce nouvel arrêt, la Cour de cassation demeure soucieuse de la bonne application du principe de réparation intégrale des préjudices, sans perte ni profit pour la victime.
N’hésitez pas à contacter Maître Bourdet afin de lui exposer la situation dans laquelle vous vous trouvez ou la difficulté à laquelle vous êtes confronté.